jeudi 17 février 2022

2022-02-17 Laurac

Nous étions dix sur le parking de Laurac, un village du bout du bout … du bout de quoi ? Un village méconnu qui fut pourtant au cœur de l’histoire.

Il faisait bien gris quand nous avons quitté Carcassonne, les Pyrénées ne daignaient pas se montrer, le ciel était toujours bas quand nous avons entrepris la vaillante montée qui nous a amenés sur les crêtes où nous attendait le vent mais aussi un paysage à couper le souffle. Au premier plan, Laurac, village accroché aux pentes de sa butte, avec, tout au sommet, son église. Tout autour, lui faisant écrin, une succession de vallonnements, une alternance de bosquets et de garrigues et de champs dont la mosaïque de couleurs révèle, même en ce temps d’hiver, la variété des cultures. Derrière, la plaine et Castelnaudary dans une tache de soleil. Plus loin encore, la Montagne Noire, encore coiffée de nuages.

Devant ce panorama, on n’a pas résisté à une lecture historique du paysage. Laurac est l’exemple même d’un « castrum » médiéval, bâti sur une position élevée qui, plus même que la défense, permettait l’affirmation du pouvoir seigneurial sur le pays environnant. La seigneurie de Laurac fut assez importante pour donner son nom au pays de Lauragais et du haut de leur château, qui s’élevait à l’emplacement de l’église actuelle, les seigneurs du lieu tenaient une place importante entre les comtes de Toulouse et ceux de Carcassonne. Ils disparurent dans la tourmente de la croisade contre les Albigeois mais de toutes façons, le destin du village était tracé. Au cours des derniers siècles du Moyen Age, partout le pouvoir glissa de ces châteaux perchés, impressionnants mais difficiles d’accès, vers les plaines où passaient les voies de communication, où prospérait le commerce et où une administration de plus en plus nombreuse pouvait s’implanter. Le paysage que nous voyons ici illustre admirablement cette situation : de Laurac, capitale du pays de Lauragais au début du Moyen Age juchée sur son piton, la puissance publique se transporta sur Castelnaudary, la ville de la plaine et de la grande route. L’autoroute  que nous devinons là-bas, au-dessous de nous, en est aujourd’hui l’héritière.

            Et ce n’est pas le seul appel de l’histoire dans ce paysage de Laurac. Loin des « citadelles du vertige » un peu abusivement associées au catharisme, c’est ici, dans ces villages du Lauragais, que l’hérésie cathare fut la plus profondément implantée. Blanche, dame de Laurac, en fut une des plus grandes figures et elle établit à Laurac une maison, un couvent pourrait-on dire, de femmes hérétiques. Parmi ses enfants, deux furent des héros tragiques du temps de la croisade contre les Albigeois : Aimeri, seigneur de Montréal, fut exécuté avec ses 80 chevaliers par les hommes de Montfort tandis que sa sœur na Geralda, dame de Lavaur, était jetée vivante dans un puits où elle fut lapidée.

            Et ce n’était pas fini ! L’histoire nous a rattrapés tout en haut des crêtes où subsiste encore une énorme borne de carrefour du XIXe siècle, qui ressemble plus à un obélisque qu’à nos panneaux routiers et, tout à côté, témoignage d’une autre période tragique, une stèle à la mémoire d’un franc tireur partisan tombé ici à la veille de la Libération.

            Et puis, récompense de notre vaillance, le soleil s’est levé et a éclairé magnifiquement le paysage. Et ce furent des sentiers semés de pétales roses ou blancs d’amandiers en fleurs, bordés de romarin en fleur et d’autres fleurs printanières, jaunes, bleues, et émaillés de pâquerettes roses et blanches. Puis le village de Laurabuc, un détour par son église, une petite pause tout en haut du village au pied d’une impressionnante croix de mission, la découverte d’un très joli lavoir, original, établi sur un barrage de ruisseau, la montée du calvaire, chemin menant à la chapelle au milieu de grands arbres, jalonné par les 14 stations dont les images naïves ont été récemment repeintes de couleurs vives. Et enfin le retour sur Laurac, avec de très belles vues sur les Pyrénées enneigées qui, enfin, du Madres au Canigou, se révélaient à notre horizon, et des arrêts à de beaux édicules protégeant les fontaines du village et le « poids public ». Cerise sur le gâteau, certains ont rajouté une petite visite de la partie ancienne du village, les restes de ses remparts, son église monumentale couronnant la colline et tout là-haut, sur une terrasse sommitale, un amandier dont les branches lourdes de fleurs blanches se détachaient sur de lourds nuages noirs dans la lumière dorée du soir…

Merci à Jocelyne et à Martine de nous avoir fait découvrir ces paysages chargés d’âme.

Compte rendu de Claudine

Photos de Roger ici 

Photos de Jocelyne ici

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